samedi 12 juin 2010

L'arbre: Une cloture à l'image de la sélection *


L'arbre de Julie Bertucelli clôturait cette sélection 2010 à son image. Si le film semblait partir sur des bases intéressantes et donner à la nature une place importante, si la présence de Charlotte Gainsbourg nous rappelait le houleux Antechrist; si Julie Bertucelli nous est conseillée par D. Haudepin dans un troquet de la Bocca, si la photographie tire partie des paysages et techniques australiennes; malheureusement l'intrigue se meurt rapidement, et le rythme choisi s'avère un hymne à dodo. On  s'ennuie. A l'image de la sélection toute entière, l'objet qui nous est donné à voir ne révolutionnera rien à ce qui fut.

L'autre monde un Cinéma poubelle


Faire une critique construite de ce navet ultime serait lui faire trop honneur, nul sur toute la ligne, affligeant, incommensurément anodin et insipide, tout y est raté; et nous ne sommes pas fan du "prince ringard" et de l'arrière train de l'ancienne miss météo de canal dont la ligne très imparfaite aurait du nous mettre la puce à l'oreille. Véritablement à éviter. (Le plus mauvais film donné à voir à Cannes avec Kaboom).

L'étrange affaire Angélica * Oliveira pour une fois décoit

Nous avions beaucoup aimé "Singularité d'une jeune fille blonde" pour sa fraîcheur, sa causticité, et le regard tout à la fois amusé et curieux du maître lisutanien. Cette fois, le parti pris anti-moderne est toujours à louer. La volonté de nous dresser le portrait d'un original abandonné à sa passion pour la photographie - le maître lui même ? séduit, tout comme quelques savoureuses discussions autour de sujets qui assouvissent la curiosité d'Oliveira l'érudit toujours en quête de nouvelle connaissance. Mais dans l'ensemble l'imagerie nuit au film, quelques effets peu spéciaux déservent plus le récit qu'ils ne l'agrémentent et la trame est somme toute convenue. L'effet bluette malicieuse n'opère pas comme dans "Singularité d'une jeune fille blonde".
Dommage, car Cannes a rendu hommage à Oliveira, et nous aurions aimé dans ce papier rendre hommage aussi à l'oeuvre toute entière au travers de la plus récente, mais nous préfèrons l'oeuvre globale ...

Film Socialisme Godard nous enfume ? *

Pardon ? Oui, c'est bien vous qui me critiquez ? Peut être pas ... Je n'aime pas Hitler. Staline ne jouait pas au tennis. Cathy Tanvier, si. Pourquoi Socialisme ? Parce que Patty Smith. Pourquoi Patty Smith ? Parce qu'elle était là. Pourquoi un film ? Parce que Cannes ... Sinon rien de neuf, JLG n'est pas revenu ... On sourit, on réfléchit, on note quelques références, certains crient au génie pour se faire remarquer, d'autres s'outrent de ne rien comprendre et nous alors ? Bah on ne déteste pas, mais on n'aime pas quand même. Peut donner des idées, voilà tout. Dire de JLG que son film est commun et ordinaire, voire normal, n'est-ce pas une vraie critique ?

Un homme qui crie n'est pas un ours qui danse Cinéma Afrique ***


Ce film gagne à être vu, son propos est fort, son sujet grave, et le regard porté n'est pas le regard européen, miséricordieux, épinalien ou enjoliveur. L'acteur principal aurait mérité le prix d'interprétation. Le film pêche parfois dans le rythme, mais la technique filmique est bonne, et la photographie par exemple très intéressante. A l'image de White Material de Claire Denis, on sent l'Afrique. Et rien que cela vaut le coup.

Tournée *** Amalric est aussi un cinéaste !

Nous ne savions pas ce qu'attendre de ce film de Mathieu Amalric. Et cela est très certainement une condition pour l'apprécier justement. Car Tournée est avant tout une mise en abîme, un show filmé, un show qui se cherche, qui déambule; qui use les lumières et joue de tout ce qui brille. L'éclat, le brillant, le strass, les paillettes sont questionnés, au travers d'un personnage aigri et blessé, un ancien show-man à succès à qui on a retiré justement les moyens de son succès. Succès aveuglant qui a fait de lui un saltimbanque dépassé par la vie, mais qui vit pourtant. On apprèciera surtout dans "Tournée" le côté valse des humanités, le côté exploratoire et l'absence de messages de vérités tous faits. Les émotions sont au rendez-vous, on sourit, on s'attendrit, on suit les évolutions et les questionnements des acteurs, et actrices. N'est-ce pas cela le New Burlesque au final ? Le rythme en tout cas est très bien choisi, et Amalric montre qu'il possède un oeil précis, celui d'un cinéaste.

Poetry *** un portrait coréen


Poetry aurait été ma palme par dépit. Nulle révolution cinématographique. Mais le parti pris scénaristique est particulièrement intéressant; le portrait de cette femme du troisième âge en proie à des doutes existentielles est un magnifique sujet, et le parallèle avec la poésie particulièrement touchant. Le film laisse une empreinte, marque les esprits en douceur; on s'attache à ce petit bout de femme. Nous reconnaissons là toute la qualité du cinéma asiatique, capable de nous intriguer par une vision en décalage avec la vision occidentale. Le temps qui passe n'est pas tellement ici questionné, mais celui qui est passé si. Un beau film à défaut d'être un chef d'oeuvre, mais la sélection n'en comportait pas.

Biutiful ** à trop en dire on en dit moins

Inaritu a cette particularité que chacun de ses nouveaux films est moins bon que son précédent. Biutiful démarre déjà avec un handicap pour nous francophones, pourquoi devrions nous apprécier que la racine originelle du mot beautiful soit ainsi escamoté pour laisser place à une sonorité bien plus anglaise. Beau est plus agréable à l'oreille que biou me semble-t-il.
L'effet, puisque c'est bien de cela qu'il s'agit, n'est pas complètement maîtrisé. Il en est ainsi de tout le film "Biutiful" qui, s'il n'avait pas cherché à tout prix à rajouter du pathos au pathos, aurait pu laisser place à un portait sensible, ou à un propos militant. Nous avons surtout vu des effets, et étrangement ces derniers produisent parfois les effets inverses que leurs intentions initiales: là où on devrait pleurer ou s'émerveiller on se blase. Javier Bardem a obtenu le prix d'interprétation, et pourtant sa composition n'a rien d'exceptionnelle, il incarne juste une sorte de robin des bois aux abois. Il serait exagéré de dire que "Biutiful" est un mauvais film, mais en tout cas, il est décevant de la part d'Inaritu dont on sait qu'il a à ses débuts apporté un souffle, certainement pas de fraîcheur, mais en tout cas dans la façon de raconter un évènement, dont on a pensé qu'il proposait une nouvelle modernité, et dont on constate que son inspiration ne se renouvelle pas.

Another year * un mike leigh plutot insipide et insulaire

Une petite comédie très anodine, ni drôle ni ratée, qui parlera beaucoup plus au britannique moyen critiqué mais qui ne s'y reconnaitra peut être pas, qu'à une population cinéphillique qui attend d'un film sélectionné au festival de Cannes qu'il surprenne.
Autant "Be happy" était fort sympathique, autant "Another year" est insipide.

mardi 8 juin 2010

Uncle Boonmee who can recall his past lives d'Apichatpong Weerasethakul ***

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Oncle Boonme, le personnage du titre, est sous dialyse et sent sa fin venir. Un soir, alors qu'il est à table, sa femme défunte lui apparaît...
Oncle Boonme, Palme d'or 2010, est un film trip. On l'a comparé à 2001 : Odyssée de l'espace, à raison. L'histoire est inracontable, on sort de ses repères coutumiers, mais le cinéaste nous emmène dans un voyage inédit, dans le jamais vu, installant un rythme hypnotique qui lui est propre. On assiste à un voyage dans le temps, y compris dans les temporalités parallèles sans jamais perdre le fil. Les poissons chats parlent, les singes sont des fantômes anciennement humains. Sur la dernière partie du film, il y a quelque chose de la vidéo d'art plastique -et pour cause, l'auteur donne aussi dans cette discipline. La photographie n'est pas si belle que ça, elle est plutôt rudimentaire. Les effets spéciaux sont vintage. Ceci, plus le manque de repères pour l'occidental, peut expliquer pourquoi le film, lors de sa projection, a reçu un "mauvais" accueil : certes, ceux qui applaudissaient le faisaient d'une très manière soutenue, mais nombreux étaient les sifflets, sans parler des gens quittant la salle, furieux, durant la projection.
Il n'en reste pas moins qu'Oncle Boonme est un bon film. Pas forcément universellement accessible, mais qui offre un spectacle planant et inédit pour qui consent à s'y abandonner.

Rebecca H. (Return to the dogs) de Lodge Kerrigan


Rebecca H. (Géraldine Pailhas) est un paumée qui veut partir en Amérique pour faire chanteuse. Mais il y a aussi le personnage de Géraldine Pailhas joué par cette dernière qui doit interpréter, sous la direction de Lodge Kerrigan, le biopic d'une chanteuse américaine des 70's... Rebecca croise Géraldine par le biais d'une télvision. Est-ce que Rebecca H. est le double de Géraldine ou est-ce que Géraldine a juste interprèté le rôle de Rebecca ?
Lodge Kerrigan (Claire Dolan) était très attendu au Festival... Rebecca H. est une commande tombée à l'eau. Avec le matériel filmique dont il dispose, Kerrigan nous fait le coup de la mise en abîme et de l'opacité Lynchienne. Las ! On a l'impression de voir les rushes d'un film inabouti... Le film tourne en rond. L'ennui et l'énervement s'invitent malgré toute la bonne volonté qu'on y met. Un film exceptionnellement mauvais.

mardi 20 avril 2010

New york I love you *




Le concept de Paris je t'aime, cette fois sur la ville de New York : une série de courts métrages, réalisés par divers auteurs, dont des acteurs (ici Yvan Attal et Nathalie Portman). De même que le 1er concept (des histoires liées à la ville de Paris) le résultat est inégal. D'autant plus que les histoires, de pattes très différentes, sont artificiellement liées pour créer un ensemble homogène -lien factice et vain pour des univers si différents. On ressort cependant enchanté de cet entreprise inégale, de par le regard "exotique" posé sur une ville non moins "exotique" pour les français que nous sommes. Et c'est un français, justement, qui s'en sort le mieux : Yvan Attal, qui continue dans son obsession de la pérennité du couple et de la séduction, thématique déjà usée chez lui mais si gracieusement interprétée par Robin Wright Penn ou Ethan Awke. D'autres sckeches, bien que pas forcément de meilleur goût (Brett Ratner) ou réussi (Nathalie Portmann en juive orthodoxe ou Shu Qi en muse mystérieuse) nous donne à voir des acteur magiques dans une ville magique. Le principe même de variété nous porte d'un univers à un autre. Aussi quitte-t-on un univers peu crédible pour un autre plus attrayant, le tout dans des jolies photographies avec de grands acteurs parfois rares (Elli Wallach, 93 ans). C'est déjà ça.

8 fois debout **

Critique à venir. Un premier film qui alterne du bon et du moins bon, pas à la hauteur des références parfois citées ici ou là. Performance intéressante de Julie Gayet.

Domaine *

Critique à venir. Béatrice Dalle dans un film plutôt pompeux, avec une composition certes intéressante mais peu poignante.

dimanche 11 avril 2010

Ajami, encensé certes ... *

Caméra d'or à Cannes, nommé pour le meilleur film étranger aux Oscars, des distinctions dans de nombreux festivals; film co-réalisé par deux citoyens Israeliens, l'un juif l'autre arabe, qui reçoit de façon quasi unanime dans la presse une excellente critique, nous nous attendions à un "masterpiece", à une oeuvre emprunte d'originalité, de sensibilité, ou bien à une oeuvre choc. En sus, la production cinématographique Israelienne de ces dernières années, nous a valu quelques pépites - l'art et la réflexion étant d'autant plus utile là où le social et le politique émeuvent, théâtre majeur du schiste des religions.
Cette carte de visite finalement élogieuse peut-elle, a fortiori, influer (négativement) notre regard ? certainement.
Ajami est le nom d'un quartier de Jaffa, au sud de Tel Aviv, l'un des rares quartiers où juifs et arabes cohabitent en Israël. Scène idéale pour ce projet, dont la genèse remonte à 2002, quand Yaron Shani, Israélien, juif, rencontre Scandar Copti, citoyen d'Israel arabe de confession chrétienne et porteur de projet vidéo.Ensemble, ils décident de monter un film qui relate la cohabitation dans le territoire d'Israël, sur un mode cinéma vérité, avec des acteurs qui n'en sont pas (immense casting ayant duré plus d'un an !) et dont l'émotion ne soit pas feinte - le film est tourné de manière chronologique, pour que les acteurs découvrent le film au fur et à mesure et que les émotions soient les leurs et non celles de comédiens préparés.
La mise en scène sera pédagogique vous diront certains, calqué, imité, alambiqué vous répondrais-je.
5 chapitres convient les personnages centraux de cette histoire, noire au possible, basée sur des relations de pouvoir, le banditisme et son lot de meurtres, sur fond de conflits communautaires, de règlements de compte, de trafic de drogue. La chronologie est déroutante, les histoires s'imbriquent les unes aux autres. Cela peut fasciner, ajouter une dimension mystérieuse.
Parmi les nombreuses éloges, beaucoup se réfèrent à des analogies, les plus fréquentes étant Gomorra ou Amours Chiennes. D'un point de vue montage, la comparaison avec 21 grammes, par exemple, est aussi possible, mais ce qui innove apporte, ce qui imite déçoit, ou leurre.
En analogie avec Un Prophète, Ajami est un film basé sur une réputation, une sorte d'objet dont il semble, tant ils fédèrent, qu'ils bénéficient d'une impunité bien-pensante. Et pourtant, faut-il taire que comme pour Un prophète le film est d'une noirceur scénarisée à l'extrême, à en être caricaturale bien plus que précise, faut-il taire que le film surfe sur le créneau de la violence établie; innée, sans point de vue - ce qui n'est pas nécessairement un mal ou une finalité -  mais surtout sans profondeur.

A choisir, ne faut-il pas préférer les discours trompeurs, erronés, mais courageux, qui engagent leurs auteurs ? Ici le sujet semble finalement volontairement évité; sous prétexte de complexité, de terrain miné, et se pose alors la question de la dimension réelle de l'oeuvre ... Certainement pas politique, encore moins philosophique, absolument pas poétique, évidemment pas comique, pas franchement divertissante, peu émouvante. Non, il reste le thriller, le suspense, le drame, la violence, l'action, le prosaïsme, et peut être plus encore le jeu de cluedo, puzzle menteur pour comprendre. Avec la grille de critique qu'il convient d'appliquer à cette catégorie, Ajami est certainement honorable, mais vous l'aurez compris, ce billet aurait souhaité que la grille à appliquer fusse différente. On m'aurait menti ...

samedi 27 mars 2010

La rafle

Critique à venir. Décevant. (Critique audio en ligne).

L'arnacoeur ne nous arnaque pas tant que ça ... ***

Critique à venir. Une comédie qui fonctionne dans l'ensemble bien. Moderne et efficace, Duris est employé à la Bebel.
Contrairement à la photo de Vanessa Paradis non actuel, le film ne vous arnaquera pas.

Tout ce qui brille brille ***

Critique à venir. Une comédie rigolote, qui emprunte une recette comique éprouvée, avec une fraicheur intéressante. Avec et co-écrit par G. Nakache, sans machisme !

Chloe: Atom Agoyan en petite forme *

Critique à venir. Critique audio en ligne. Un film décevant loin d'Exotica. Comparable à la Vérité Nue. Remake peu flatteur de Nathalie d'Anne Fontaine.

Bad lieutenant, escale à la nouvelle orléans, un mauvais remake ? *


Critique à venir. Un film décevant dans l'ensemble - n'est pas comparable à Bad Lieutenant de Ferrara - raccourci des producteurs.

Soul kitchen, la cuisine qui fait danser ***

Critique à venir. Une comédie de Fatih Akin, entre Julie en Juillet et de l'autre côté. Plutôt agréable à regarder. Plus encore à écouter. Ours d'or à Berlin peut être exagéré cependant.

Liberté ... contrariée ***

Liberté offre un intérêt majeur, il traite d'un sujet traité mille fois, mais pas traité une seule fois sous cet angle là. On y redécouvre une partie de l'histoire oubliée, avec beaucoup d'authenticité. Comme souvent, Gatlif parvient à nous embarquer dans un univers sympathique, insufflé. Liberté est ambivalent, c'est tout à la fois le choix du nomade de ne pas se laisser enfermer entre quatre murs, mais c'est peut être plus encore ici le non choix des gitans à qui les nazis promettaient, à eux aussi, le regroupement en camps de concentration.
Le film sonne dans l'ensemble très juste et alterne rire et larmes, sourires et attachements, portés par l'interprétation d'un James Thiérrée très convaincant, très amuseur; porté à moindre titre par la rigueur contrastante d'un Marc Lavoine intéressant, quoi que son personnage soit un peu exagéré parfois; il est en tout cas bien plus intéressant ici que dans le coeur des hommes.
Marie Josée Croze complète l'affiche, mais sa partition est assez mineure et neutre, dans un rôle qui ne permet pas forcément de se mettre en avant.
Un film intéressant à découvrir.

Il manque quelques carats à Precious **

Precious s'annonçait de la plus belle veine de la mouvance indépendante, on songeait à ces quelques pépites Sundanciennes ou pas, qui nous ont fait découvrir Jarmush, ont consacré les Coen, ont laissé place à Juno et consors, on imaginait même un instant se replonger dans un brooklin boogie austerien, voire un little Italy façon Spike Lee, du temps où il était avant tout cinéaste. Le best-seller laissait deviner une mise en scène personnelle, l'affiche et les médias une actrice consensuelle. Las, le film déçoit, dans une forme s'approchant bien plus du mélo facile, avec quelques fautes de goût (cet imaginaire de Precious qui la voit princesse lorqu'elle est victime des infamies). Le propos est finalement assez peu personnel; et le pathos est mis sur le devant de la scène, sans grande subtilité (non pas qu'il faille réfléchir sur la misère à tout prix, au point de ne pas la montrer, mais ici l'entre deux - pourquoi ne pas avoir choisi une forme plus radicale ? - sonne gloubiboulga, mac do);
On reprochera donc au final un aspect somme toute superficiel, quoi que l'on doive reconnaître que l'ensemble n'est pas franchement mauvais, et que Mariah Carey par exemple s'en sort bien plus qu'honorablement.

White material âpre et maîtrisé ****

Le futile, l'accessoire de l'homme blanc en Afrique est péjorativement nommé White Material. Le regard porté par les autochtones envers leurs colons est riche d'ambiguïté, entre modèle, envie, jalousie, et rancœur, dégoût, dénigrement. Ce que la colonisation a laissé en Afrique, ce sont des hommes livrés à eux même, mais aussi quelques descendants des colons, qui ne vivent pas sur le même pied d'égalité.

Des hommes organisés, en milices, en villages, mais aussi et surtout des hommes désorganisés, des hommes divisés entre terreur gouvernementale, qui a instauré petit à petit les moyens de son assise et de sa richesse, et radicalisation de la contestation, de la rébellion.

Nous sommes quelque part en Afrique. Où ? Cela n'a pas tant d'importance. Claire Denis a connu le Cameroun, elle connaît le sujet Afrique, et son film déjà en cela est un voyage concret, non une de ces images d'Epinal qui nous fait caricaturer l'Afrique entre splendeur de la brousse et de sa faune, beauté de l'ancestralité, du tribalisme, scénarisation de la violence quotidienne et apitoiement sentimental sur les conditions sanitaires; pour qui dirons-nous, parle d'une Afrique distante qu'il ne connaît pas, ni n'a envie de connaître au fond.

L'Afrique pourtant, c'est aussi ce terrain de jeu fascinant, cet autre monde, qui fascine à ne plus vouloir la quitter; passé à l'autre bout de la nuit, le jour paraît bien fade et bien peu attirant. Quand votre vie entière fut consacrée à, raisonne autour, trouve son sens dans un engagement au quotidien, au plus prêt de la terre, en immersion locale là-bas, ici n'a plus de sens, et même le destin de votre fils ne peut remettre en cause cet enracinement.

Isabelle Huppert incarne cette réalité, si ce n'est mieux que les autres tout du moins excellement, en exploitante cafetière, femme opiniâtre, volontaire, obstinée et battante.



Autour d'elle, tout le monde lâche les armes, tout le monde reconnait, constate que la tournure des évènements condamne les règles en place, condamne un temps révolu, devenu illusions plus encore qu'illusoire. 



Entre pleutrerie et pragmatisme, dans un habit adéquat, Christophe Lambert nous réapparait excellent acteur, étrangement présent et charismatique pour un personnage qui devrait l'être moins. Isaach de Bankolé est lui aussi employé à très juste titre, en résonance entre l'histoire dans le film, et l'histoire du film, en icône. Moins judicieux est cependant le choix de Nicolas Duvauchelle en adolescent tantôt attardé, tantôt psychotique.



Le fonds du décor emprunte aux sujets de prédilection de Claire Denis, sa fascination de la provocation, de l'outrage paraît ici encore, mais elle semble ici parlé vrai, sans exagération; elle fait preuve en effet d'une maturité cinématographique très intéressante, que ce soit dans l'image mais aussi et surtout dans la chronologie choisie. Quand la fin du film vous est dévoilé dés le départ, quel intérêt devrait-on trouver à suivre les faux espoirs, chronologiquement antérieur, qui suivent ?

La réponse est simple, l'intérêt réside dans la complexité, dans l'ambivalence, dans le mystère, et cette impression est de surcroît persistante. Vous ne trouverez nulle réponse évidente, nul pamphlet moralisateur dans ce White Material, aussi âpre que maîtrisé. Très certainement parmi les plus belles réussites de Claire Denis.  

vendredi 19 février 2010

Lovely bones *

Que dire de Lovely Bones, le dernier film de Peter Jackson, sinon que l'histoire au départ semblait alléchante: une jeune fille qu'on a assassiné observe de l'au-delà ceux qu'elle a laissés.

On s'attendait alors à du fantastique, du suspense mais rien de tout ça .

On se retrouve flanqué d'un film mièvre et complaisant. Une peinture fade et consensuelle d'une famille américaine dans les années 70, un assassin, caricature du psychopathe vu par les américains, et une enquête policière menée sans rythme et sans suspense.

Le plus décevant est la partie fantastique du film et les images sans invention et plates, comme un fond d'écran d'ordinateur, du paradis.

Le réalisateur de King Kong et du Seigneur des anneaux, passe à côté de son sujet en jouant sur la corde sensible des sentiments, en tentant de nous émouvoir en vain. Et l'apparition survitaminée de la talentueuse Susan Sarandon n'y changera rien.

On a l'impression de regarder un mauvais épisode d'une série américaine sirupeuse avec effet lacrymal. Mais là nous ne marchons pas. Faut pas déconner quand même.

lundi 1 février 2010

A serious man

Critique à venir par Maelig. Un film très décevant.

Esther ***

In the air ***

Une petite zone de turbulence **

samedi 23 janvier 2010

Gainsbourg (vie héroïque) de Joan Sfar... plutôt pour ! **



Gainsbourg vu par Joann Sfar, du jeune Lucien Ginsburg des années 40 jusqu'au compositeur et chanteur célébré dans le monde entier...



Ce film est autant un film parlant de Gainsbourg que de Joann Sfar, dont la présence claque à chaque image par le biais du dessin animé, des animations 3 D, des marionnettes, des dessins ou des toiles de L.Ginsburg peintes (ou plutôt dessinées) par Joann Sfar himself...

Le bédéaste désormais cinéaste fusionne, de son propre aveu, le peintre Pascin dont il a mis en en scène la vie en BD ou Romain Gary au beau Serge. Le "vrai" Gainsbourg passe donc au second plan. Il n'est qu'un sujet, un prétexte.




La première partie du film, celle qui s'attaque à la vie méconnue de Lucien G; ou du jeune Gainsbourg, fontionne parfaitement : un films onirique, un BD animée, qui mêle les obsession de Sfar -la judaïsme, les femmes, un humour particulier à une vie mensongère de Gainsbourg -ou comment Gainsbourg réarrangeait sa vie au gré de son esthétisme et d'un imaginaire fort.

Dès lors que le film s'attaque à la partie "connue" de Gainsbourg, les escapades dans l'onirisme fonctionne moins bien? Sfar se fait maladroit, mélange honteusement les époques. Le Gainsbourg ayant eu sa crise cardiaque dans les années 70 n'étaient nullement en uniforme de Gainsbarre, pas plus qu'il n'est monté sur scène à l'époque de l'album Rock around the Bunker, ni qu'il ait rencontré Bambou à la sortie de Love on the beat (1984) ou... des Guignols (1990). La deuxième époque du film expose des éposodes médiatisées : l'enregistrement du premier album reggae (sa période musicale la moins bonne) , le scandale à la sortie de La Marseillaise reggae. Le film se fait dès lors beaucoup moins intéressant, voire ennuyeux et bâcle. Sfar a contre lui les images peuplant l'inconscient collectif français voire international : les apparitions mythiques du couple formé avec Birkin puis Bambou, l'épisode de sa confrontation avec les paramilitaire français devant qui il a chanté la Marseillaise version classique... Image qui se superposent à celles de Sfar, le plus souvent à son détriment.

Sfar, débutant au cinéma, mais superstar de la BD, expédie son sujet et l'on sent qu'il a été peu remis en question dans ses choix artistiques. Il a tout de même pour gloire de faire exister, dans un premier temps, un Gainsbourg pascinïsé, de réussiter de beaux morts -parfois encore en vie, parfois fictifs- ou de rendre hommage à des figures éludées par Gainsbourg lui-même : la maman de Lucien, sortie tout droit d'un tableau de Klimnt, la Muse-modèle du petit Lucien, Elisabeth Levinsky (première épouse), Françoise-Antoinette Pancrazzi (deuxième épouse), et par ce biais leurs enfants Paul et Natacha...



Car ce film aurait pu s'appeler Gainsourg et les femmes, de par le défilé impressionnant de tout les types de beauté qui côtoient le personnage : de la ronde pulpeuse très sfarienne (le Modèle, Elisabeth, la coiffeuse) à la beauté froide à la Grace Kelly (Françoise) ; de l'icône de beauté mondiale (BB) à l'archétype Birkienne(touchante Lucy Gordon) ou Bambouien (étonnante Mylène Jampanoï) beauté fragile, frêle, émouvante en passant par la fausse lolita (Sarah Forestier en France Gall) à la vraie femme fatale ensocelante (Anna Mouglalis en Juliette Greco)...

Casta est l'une des incarnation les plus marquantes, en ceci qu'elle relève le défi (avec succès) d'incarner Bardot, jamais tant abordé de font au cinéma depuis la retraite précoce du sex symbol. Casta a été dirigée par BB elle-même qui lui prodigua force conseils et précisions, et cela se sent, et cela se voit : on y croit, presque autant que lorsque qu'on voit Eric Elmosnino de profil : pour peu, on croirait voir les vrais devant nous.



En somme un film dont les images imprégnent les rétines et la mémoire, mais choit en plein milieu, déçoit aussi : et pour cause, il était trop attendu

vendredi 22 janvier 2010

Gainsbourg (vie héroique)**

Gainsbourg (vie héroique) est le premier film de Johann Sfar, auteur de bd reconnu.
On attendait avec impatience la sortie de ce film sur l'un des personnages les plus provocateurs, les plus sulfureux et finalement les plus aimés du paysage français. Sfar a voulu donner sa propre vision de Gainsbourg.
Ce n'est donc pas strictement un "biopic" mais un "conte" que nous présente le réalisateur. Il laisse donc une large place à l'inventivité dans le portrait qu'il fait de Gainsbourg. Cependant, pour ceux qui connaissent sur le bout des doigts la vie du chanteur, ils reconnaitront beaucoup d'élements puisés dans ses nombreuses biographies. Par ailleurs Sfar s'est beaucoup documenté pour retracer la vie de l'artiste dans des interviews télés entre autre. Pour représenter Gainsbourg, Sfar se tient tout de même à une trame chronologique qui va de son enfance, dans les années 40, aux médiatiques années 80.
Entre paranthèses, le voyage parcouru par le jeune Lucien à l'étoile jaune immigré russe au Gainsbourg chantant la marseillaise devant les paras est édifiant. Un modèle d'intégration en plein débat sur l'identité nationale?
Mais revenons en au film. Le graphisme bd du générique du début du film baigne le spectateur dans une ambiance onirique. On s'attend alors à voir un Gainsbourg fantasmé par Sfar, un Gainsbourg personnel. Pari en partie réussi. Le réalisateur va aborder les différents aspects de la vie du chanteur: sa judéité (l'enfance juive), la peinture, la musique, les femmes ... en mêlant rêve et réalité.

Pour incarner Gainsbourg adulte , Sfar a choisi le comédien Eric Elmosnino qui a une ressemblance frappante avec le chanteur, un mimétisme dans l'attitude, la voix, les gestes. Il nous dévoile un personnage bohême, fragile, lunaire, timide, farceur, avec cette pointe d'insolence qu'avait Gainsbourg. Les rôles féminins submergent littéralement le film, comme si les femmes avaient contribué à façonner le mythe Gainsbourg. Elles sont la clef de son succès, le fruit de ses idylles et de ses déboires amoureux. Tout d'abord Anna Mouglalis campe une Juliette Géco ténébreuse à souhait, Laetitia Casta crédible dans le rôle d'une Brigitte Bardot fatale. On peut noter l'apparition de Yolande Moreau qui incarne la chanteuse Fréhel et la jeune Sarah Forestier (héroine de L'Esquive) dans la peau d'une France Gall débutante qui goutera bientôt aux délices des sucettes à l'anis. Mylene Jampanoï clôture le bal dans le rôle de l'ultime femme : Bambou. Mais l'interprétation la plus juste et la plus touchante revient à Lucy Gordon qui révele une Jane Birkin nature -sans doute la moins sophistiquée de toutes ses muses. Elle donne une fraicheur et un naturel inédits au personnage.

Dans le film, Sfar invente un double à Gainsbourg, une créature tout droit sortie de son imaginaire, qui le suit dans ses déplacements : une sorte de mauvais génie. La présence de ce personnage donne une dimension ludique et surréaliste au déroulement du film. On peut l'interpréter comme la conscience de l'artiste. Au point de vue musical, on reconnaitra quelques standards du chanteur et sinon on peut noter que les morceaux ont été réarrangés pour le film. On aurait pu souhaiter que Sfar se penche plus sur la relation de Gainsbourg à la création musicale. A noter la présence du chanteur Boris Vian incarné par un Philippe Katherine égal à lui même. Le film n'apprend rien de plus aux fans de Gainsbourg sur sa vie. Mais par contre il permet au spectateurs de voir deux univers s'entrechoquer : la bd et le cinéma. D'ailleurs, Sfar intervient dans le film en prêtant sa plume au jeune Lucien dessinateur. Sans doute que le film ne restera pas dans les annales du cinéma. Mais il a ses moments de grâce surtout quand on aime Gainsbourg, le roman de sa vie. En préférant mentir sur la vie qu'il retranscrit du chanteur, Sfar nous laisse l'opportunité de garder notre propre vérité sur l'artiste et de continuer à projetter nos propres fantasmes en l'écoutant. Car le Gainsbourg qu'on aime le plus c'est celui que nous n'avons pas connu et que nous ne connaitrons jamais.


mardi 19 janvier 2010

Mr Nobody *****

Au bon souvenir de Jaco Van Dormael. En contraste avec d'autres réalisateurs qui ne se font pas rares, Jaco Van Dormael n'était pas réapparu sur grand écran depuis "le huitième jour", portrait humaniste et tendre qui contait l'amitié entre Daniel Auteuil et Pascal Duquenne, trisomique acteur, nous étions en 1996. Tous deux étaient récompensés du prix d'interprétation à Cannes.
Jaco Van Dormael, c'est aussi et bien sûr "Toto le héros", formidable récit, où la tendresse, la nostalgie, les facéties tout aussi bien du jeune Toto que du même Toto, plus agé, extraordinaire Michel Bouquet, ne pouvaient que difficilement laissé insensible, surtout que la marque de fabrique est l'imaginaire, voire l'onirisme.
Oh il y a bien eu le clip de Ladyboy pour Indochine, mais cela ne compte pas vraiment ...
Jaco Van Dormael revient donc en 2010, avec un projet mégalo, avec un budget conséquent, dans un film qu'il a mis plus de 7 ans à écrire, et dont il a léché absolument tous les plans.
Géniale mise en scène, qui ose des prises de vues très novatrices, pour conter un récit qui veut montrer la complexité des choses, la complexité des destins, la complexité de l'amour; la complexité de la science et des inconnus, autour de la zone d'ombre, trou noir, de la réunion de la mécanique quantique avec la théorie de la relativité générale; la théorie des cordes qui ouvre la porte de la réversibilité du temps, de la multiplication des dimensions temporelles.
Au départ, un enfant doit choisir entre son père et sa mère, qui se déchirent. au départ, mais aussi en fin. Le destin sera différent s'il prend le train où ne le prend pas, tout comme il sera différent s'il choisit de vivre son amour, de vivre par amour, de vivre aimé, ou de vivre amoureux perdu.
L'amour encore et toujours, qui d'un pari adolescent mène à Mars, après hibernation. Le décor devient futuriste, les moyens sont d'importances, les trouvailles curieuses et sympathiques. D'aucuns ne diront que cela a déjà été fait, peut être, mais dans des oeuvres de seconde zone; ici, l'univers d'un Gondry par exemple n'est pas imité, il est outrepassé, relégué à ses études; le bric à brac inventif frise parfois le génie; les effets visuels irradient, et Clouzot s'il était venu au bout de son "enfer" ne l'aurait pas renié, au contraire de Chabrol qui refuse la sophistication.
Ce film ne se raconte pas, il se rêve; vos paupières sont lourdes, lourdes, et Mr Nobody va vous faire voyager parmi ses souvenirs, rêveries et autres incertitudes. Il sera le dernier être humain à mourir, le dernier être humain à conter l'amour.
L'onirisme permanent se ressent dés le départ, et ne vous quitte pas, le récit est celui de quelqu'un qui aime à la folie, qui confond, qui se raccroche au signe. La déconstruction totale du récit est un autre coup de maître, là ou Lynch pourtant précurseur se leurrait dans le patchwork (inland empire) à nous confondre, Van Dormael réussit ce pari assez fou de déplacer son récit dans tous les sens, de le reprendre en permanence là où il ne l'avait pas laissé. Le montage est proprement sidérant.

Il reste à commenter les acteurs, à commencer par Jared Leto, retenu pour ses qualités de transformiste. Voilà une dimension supplémentaire, à un film qui n'en manque pas. Il excelle disons le, son faciès sied à merveille à ce personnage de Mr nobody, personne et tout le monde à la fois.
Les personnages féminins ne sont pas en reste, 3 femmes pour 2 partitions riches (Diane Kruger, Sarah Polley) et une plus en retrait (Linh Dan Pham).
Les adolescents et enfants y sont très touchants, car c'est là l'une des caractéristiques principales de Van Dormael, il parvient là où peu se risquent, à nous émouvoir, à nous toucher très sensiblement, à force de positivisme, de tendresse, de rêve, d'humour léger, d'amour disons le (eh oui c'est un romantique patenté); et c'est là un exercice de style extrêmement difficile.
Une bonne partie de la critique s'est agacée de l'ambition montrée par Von Dormael sur ce film; cette distance qu'il prend par rapport au métier déplait, surtout que son arrogance va jusqu'à glisser dans son film que le cinéma français se complaît dans l'inaction et la lenteur; lui préfère la musique omni-présente, et son frère lui offre ici une bande originale très appropriée, entre référence nostalgique et air mélancolique au piano.
Cette oeuvre ne plaira pas à tous, elle a de quoi déranger, le rêve proposé ne parlera pas à tout à chacun, Van Dormael s'est exposé à trop se cacher; a pris des risques, et son film dont il dit lui même que c'est un film sur le doute mais qu'il en doute, a réellement de quoi devenir culte, à classer dans les incompris.
Maintenant, cela n'empêchera jamais que beaucoup préfèreront que les hauts budgets soient utilisés à la Cameron ...



lundi 18 janvier 2010

Agora d'Alejandro Amenabar ***



IVème siècle après Jésus-Christ. L'Egypte est sous domination romaine. A Alexandrie, la révolte des Chrétiens gronde. Réfugiée dans la grande Bibliothèque, désormais menacée par la colère des insurgés, la brillante philosophe-astronome Hypatie tente de préserver les connaissances accumulées depuis des siècles, avec l'aide de ses disciples.
Parmi eux, deux hommes se disputent l'amour d'Hypatie : Oreste et le jeune esclave Davus, déchiré entre ses sentiments et la perspective d'être affranchi s'il accepte de rejoindre les Chrétiens, de plus en plus puissants...




Nicole Kidman a refusé d'incarner le rôle d'Hypathie, source de controverses, et c'est tant mieux car nous ne perdons pas au change, au contraire : la sublime Rachel Weisz (The constant gardener) incarne la philosophe, personnage central et clé de ce péplum-qui-n'en-est-pas-vraiment-un.
Amenabar, réalisateur d'origine espagnole est connu pour ses films glaçants Ouvre les yeux et Les autres. Il passe à un autre style de film sans s'y casser les dents et prouve qu'un film d'auteur à grand (très grand) budget peut encore exister. Les scène d'actions sont novatrices et parfaitement maîtrisées, la reconstitution impeccable, les scène intimes sont aussi bien tournées et fortes que les scènes d'actions et des plans intriguant et audacieux viennent nous rappeler qu'il s'agit d'un film fait par un artiste et non par un technicien au service d'Hollywood.
Le personnage d'Hypathie, figure centrale de l'intrigue, jeune femme de génie sourde aux bassesses humaines, éprise de science et de quête de vérité, accroche et fascine le spectateur autant qu'elle déchaîne les passions. Elle s'affirme comme un esprit avant d'être une femme -enfermée dans son inflexible ascèse- et refusant l'amour de son disciple et de son esclave, elle devient femme d'influence, femme politique, symbole d'un monde à détruire pour ses détracteurs. En somme, elle bouleverse autant qu'elle dérange. Présence charismatique et interprétation impeccable de Rachel Weisz qui trouve ici écrin à son talent après des débuts difficiles -La momie.



Autour d'elle, les intellectuels et cinéphiles découvriront avec surprise Michael Lonsdale (oui celui des films de Marguerite Duras ou de La question humaine) mais aussi des visages familiers tels que celui du très mignon Max Minghella (Art School Confidential) ou celui du terrifiant Ashraf Barhom (La fiancée syrienne, Paradise now).

Agora peut être un film très dérangeant pour le spectateur croyant -un film certainement plus scandaleux en Espagne ou aux États Unis qu'au pays de Voltaire. Car le réalisateur se place ostensiblement du côté de son héroïne, qui ne croit qu'en la science, et montre un visage barbare et dangereux des religions -quelles qu'elles soient. L'épilogue, fondé sur des réalités historiques, montre un visage peu avenant de la religion chrétienne.
Difficile aussi de ne pas établir un parallèle évident avec le monde actuel, là où tant de guerres ou d'actes sanglants ont été provoqués avec, pour otage ou prétexte, la Vérité et la Volonté Divine, prétexte aux manipulations et oppressions politiques, aux injustices, aux bains de sang.



Site officiel du film : http://agorathemovie.com/

dimanche 3 janvier 2010

Tetro... beau ! ****

F..F. Coppola avait presque disparu de notre conscient, après avoir marqué l'histoire du cinéma avec ces pièces de maître, les plus connues, que sont Apocalipse now, et la série des Parrains.
Les années 2000 ne furent pas les siennes -la succession étant par ailleurs bien assurée par sa fille. A croire qu'il attendait l'orée -l'aube?- de la deux cent unième décennie pour rappeler de quel cinéma il se déclare, de quelles inspirations lyriques il était capable.
Le Parrain est de retour serait-on tenté de dire, avec une coloration cette fois-ci très indépendante, novatrice même. Les flashback colorés répondent par merveille au léché du noir et blanc narratif, l'effet peut sembler tout à la fois simple, étrange; il est en fait symbolique de la réussite du film, qui convie différents arts, différentes intrigues, différentes lumières, différents plans, le tout dans une musique littéraire orchestrée de baguettes de maître.
Coppola sait de plus ici séduire un public moins testostéroné, si les thèmes de parricide, de référence au père, de trahison, de lutte d'influence, la rivalité ne nous sont pas étrangers dans sa filmographie, ici la relation à trois entre les personnages, tous excellemment interprétés - Vincent Gallo, Alden Ehrenreich, Maribel Verdu -, passionne très rapidement, le mystère plane, les mises en abîmes se succèdent les unes aux autres, nous sommes conviés à un voyage artistique, de l'opérette au théâtre de cabaret, du concert à la littérature; les destins se croisent et se rencontrent.






Cinéma américain peut être, à l'inspiration indépendante, à la coloration européenne.
L'ambiance nous questionne, nous émeut aussi, en quelques mots, ce film présente un charisme singulier.
Une véritable réussite, à laquelle les effets spéciaux, qui sont nombreux, contribuent dans une orientation rare; à la surenchère et à la démonstration, Coppola préfère la finesse, l'invention onirique, le tout en grande discrétion. Le seul bémol que l'on pourrait émettre serait le trop plein scénaristique, mais est-ce un mal ?
Pourquoi ce film n'a-t-il pas trouvé sa place dans la sélection officielle de Cannes ? Pas suffisamment austère peut être ... Dommage, quelques récompenses se sont sans doutes perdues.



Palmarès 2009 de Fred