vendredi 5 juin 2009

Antichrist ***


Soufre. Satan.
Nous parlons quand même de Von Trier, longtemps adulé tant que les récompenses ne suivaient pas, tant qu'il était dans l'ombre, et qui une fois parvenu, a commencé à faire naître des polémiques, a s'attirer les foudres de ceux là même qui l'ignoraient, ne le connaissaient pas.
Disons-le tout net, Antichrist n'est pas son meilleur film.
L'indignation est générale, et cette indignation, est par contre, très indignante.
Provocation, masochisme, acharnement, misogynie, scandale !
Certes, ces thèses peuvent être entendues, et peut être même qu'elles sont vraies. Oui mais ! Oui mais, nous parlons d'un réalisateur qui s'est toujours mis en marge, et qui a ouvert des voies à d'autres, même si le Dogme peut paraître austère, il fut une attaque virulente et sensée de l'hollywoodisation; et c'est tout à son honneur que de se renier aujourd'hui et de revenir à une forme et à un fond très proches de ses inspirations premières, qu'elles soient celles des fantômes de l'hôpital, série tv devenue culte sans pour autant être géniale, celles de l'excellent et impeccable Element of crime, mais aussi celles de ses inspirations fondamentales: Bergman en premier; en regardant Antichrist on crève de revoir Sarabande, l'analogie nous saute aux yeux, Tarkovski en second auquel il dédicace ce film, effet Miroir ? (on est proche en effet du Miroir de Tarkovski, plus que de Solaris, quoi que ...), les dramaturges nordiques en troisième (Ibsen, Stringberg).
Parcourons tous les points positifs de cet essai; tout d'abord louons l'essai, à la manière d'un Polanski, Von Trier souhaite nous faire peur et nous questionner; poursuivons par conseiller un montage du film qui lui donnerait une couleur toute différente; regroupons le prologue et l'épilogue, et reconnaissons que ces deux scènes sont parmi les plus belles qu'ils soient. Continuons, admettons que l'effroi, s'il est maintenu par des recettes écumées de film d'horreur (des musiques stridentes, angoissantes), prend par moment. Soulignons la richesse des lectures possibles de ce film, la richesse des thèmes évoquées, en tête la Nature, la forêt, la mythologie et la théologie (quoi que cela puisse faire bondir), la mystique, la psychologie [quoi que thérapeutique], en second le lien avec Von Trier lui même et donc la mise en abîme, le côté conte de Grimm interdit aux enfants; l'extrême beauté, magnifique choix esthétique que cet opéra d'Haendel, et enfin le côté intriguant, fascinant.
Mais n'oublions cependant pas de souligner les critiques valables, celles qui refusent l'intérêt de l'entreprise pornographique, salace, ou violente, celles qui visent le côté brouillon, inabouti, celles qui visent le côté répétitif de la thérapeutie, voire même son aspect ridicule, celles qui dénoncent le ridicule aussi des thèses sataniques, celles qui dénoncent le côté abscons mais aussi facile, celles qui dénoncent jusqu'au titre même et l'attaque en règle contre la religion et laissons ouverts les débats sur la misogynie et la morale sans nous positionner avec certitude.

Ce film reste en mémoire, et pourtant, il ne peut pas être qualifié de pièce d'exception, tant l'impression qui reste est mitigée.

A voir pour les seuls cinéphiles qui s'intéressent à Bergman, à Tarkovski, pour tous les fans de Von Trier et plus exactement pour les nostalgiques d'Element of Crime, pour les personnes très averties.
A ne surtout pas voir pour tous les autres, cinéphiles ou non, cela leur serait pleinement inutile et traumatisant.


Antichrist Bande annonce

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