mercredi 26 novembre 2008

Stella de Sylvie Verheyde

Stella : "Grande petite"

On n'avait pas vu ça depuis les 400 coups de François Truffaut. Ni plus ni moins. Un film incroyablement marquant et grisant.

Sylvie Verheyde a réalisé le très beau Un frère, en 1998 (un de mes films préférés) qui révélait Emma de Caunes. Elle nous livre ici un film autobiographique sur une année de sa vie, déterminante : celle de son entrée en 6eme. La petite Stella vient d'un milieu pauvre, voire marginal. Le hasard veut qu'elle entre dans un lycée bourgois (on ne disait pas collège à l'époque) qui lui sauvera la vie, le fera se découvrir, devenir ce qu'elle est. Le petite évolue parmi les adultes et des repères délétères, rouée déjà, capable de déceler les gens fiables ou pas fiables : sa jolie mère, femme de poigne, tient un café et son beau gosse -accessoirement fille de putain- de mari. Un univers particulier.

Stella est une enfant violente, méfiante, désabusée. Durant les vacances elle part dans le nord et joue dans une décharge. Mais le lycée lui ouvre une fenètre sur le monde, tout autre. Au départ la pré ado ne comprend pas l'intérêt de l'école. Puis se fait une amie, fille de psy argentin, qui lit des livres. Stella finit par comprendre que l'école sera sa chance, se reconnaît dans les livres de Balzac et Duras, comme s'ils avaient été écrit pour elle.

Le spectateur passe tout le film dans le point de vue destabilisant de la petite héroïne. Loin, très loin d'une vision sanctifiante de l'enfance, ou d'un point de vue manichéen qui aurait été forcément inévitable dans une production américaine. La jeune fille vit des choses dures, qui serait taxées de traumatisantes dans la sensiblerie actuelles, mais continue d'avancer, déterminée, intacte.





Stella est aussi une magnifique reconstitution des années 70, telle qu'on n'en avait pas vue depuis Virgin Suicide de Sofia Coppola, jusque dans la photographie qui au passage parodie volontairement David Hamilton. La musique, que ce soit celle composé pour le film, est omniprésente : de la varitété française de l'époque Sheila ou Eddy Mitchel ou les chansons à texte de Bernard Lavillier. Les acteurs adultes sont aussi à la hauteur Karole Rocher, jolie môme de la rue, dans le rôle de la mère, Benjamin Biolay à contre emploi de son image de bobo dans celui du père, et aussi Guillaume Depardieu encore vivant, ce qui ne manque pas de faire un étrange effet.

On ne regarde pas ce film, on le vit. Ni homme, ni femme : enfant, comme disait Georges Sand ou comment l'âge adulte n'est qu'une imposture.

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