vendredi 23 janvier 2009

Louise Michel

Yolande Moreau nous avait impressionné en tant qu'actrice très récemment par son interprétation de Séraphine, tout en émotion, nous ne pensions pas la retrouver de ci-tôt dans l'univers de ses débuts, celui de Deschamps et Makeief, où les bonnes gens s'en donnent à cœur joie de remarques plus burlesques les unes que les autres, quand la bêtise est observée avec complaisance, voire tendresse, dans un petit village picard, en proie à un misérabilisme social ambiant. Ambiance Deschiens, quelque peu. Contons davantage, vous verrez, d'autres composantes s'adjoignent: Jean-Pierre pour pouvoir trouver du travail à sa sortie de prison se résout à changer de sexe, nouveau nom, Louise, direction l'usine de couture, premier fournisseur d'emploi de la région. De nombreuses amies, toutes sous-diplômées, des conditions de travail lamentables, un patron crapuleux, un responsable RH qui touche sa prime sur les salaires des employées, et qui s'adonne à quelques vices bien troublants, à en fermer ses trous de serrures, une galerie d'écervelés à faire peur, une lourdeur sociale omniprésente, ce tableau nous convie à un bal de délirants.

Geste humain de l'entreprise envers ses ouvrières, Françis Kuntz dans un habit de tortionnaire dont il se délecte depuis quelques années (direction Groland), dans un discours tout ce qu'il y a de plus minable, rappelant aux ouvrières leurs luttes passées, rappelle la grande générosité du patron de l'entreprise : nouvelle blouse pour toutes. Pilule amère ou signe d'amélioration qui donne lieu à détente, beuverie dans la bourgade, tourne au beauf ultime. La nuit passe, l'usine rouvre, les moyens de production ont disparu.

Le combat social doit commencer, et si l'hypothèse Full-Monty ou Fédération Francaise de Rugby est bien évoquée, l'idée de poser nue ou d'ouvrir une pizzéria ne rivalise pas avec la proposition de Louise, butter le patron par un professionnel, et quel professionnel ! Cathie se nomme aujourd'hui Michel après une transformation qui permet à son physique ingrat de trouver une résonance plus virile, qui lui ouvre les portes du métier d'agent de sécurité. Michel, donc, vit dans une misère assez ultime, et se rassure en s'inventant une vie de combattant du chemin des dames, ou compagnon d'Oswald.

Ce décor est bien celui qui est cher à Délépine et De Kervern, trublions de Canal Plus, et s'éloigne cette fois-ci un peu du sérieux d'Altraa ou Avida, sans pour autant tomber dans la niaiserie embourbée de Mickael Kael contre la World News Compagnie: nous versons dans le trash, sans limite, excessif à souhait; tous les interdits sont mis en scène avec beaucoup de plaisir.

Nous lorgnons bien évidemment par cet humour noir du coté du « C'est arrivé près de chez vous » de Poelvoorde et de ses amis belges, ou encore de « Bernie » de Dupontel.

Ces derniers sont au casting; tout comme d'autres amateurs du genre, le longiligne Christophe Salengro qui quitte ici sa présipauté pour arborer un seyant string ; si Gerflor refaisait des dalles il en irait de ses célébrissimes « Et hop », tandis que que Philippe Katerine se souvient de ses premiers tubes irrévérencieux, et entonne son « Jésus Christ mon amour » dans un de ses lieux glauques qui ont remplacé les maisons closes, autour d'une barre de gogo danseuses.

Le producteur du film lui même apparaît au casting, en bourgeois reconverti en écolo jusqu'au boutiste, pathétique, qui nous font, heureusement, oublier son dernier Babylon A.D. Ici Kassovitz ne semble pas franchement avoir la haine.

Ce film dérange du début à la fin (quelle introduction morbide !), c'est son but, et selon votre réceptivité, vous serez choqué et retourné, pris de malaises, ou bien vous vous plierez de rire à de nombreuses occasions, et parfois des plus simples.

En compétition à Sundance, le film en tout cas n'a que peu de chances de laisser insensible. Affreux, sales et méchants ...


Louise Michel à qui Jean Yanne rétorquait :"rouvrez les maisons".

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