lundi 22 décembre 2008

Les plages d'Agnes


Je crie au prétexte ! Les plages d'Agnès, avec un tel titre on s'attend à voyager d'Acapulco à Tahoma Beach, en passant par Ipanema ou Long Bay Beach, à voguer d'Honolulu aux Seychelles en survolant les Philippines ou la côte d'Emeraude. Mais non, Miss Varda nous réserve son 5 à 7 à elle, pour nous conter, avec le talent que seules les personnes sages peuvent avoir, l'histoire de ses plages certes, mais avant tout l'histoire d'Agnès, l'histoire de ses films, l'histoire de ses amis, l'histoire des projets d'Agnès. Elle n'est plus toute jeune la seule réalisatrice de la nouvelle Vague, conseillée par son mari, Jacquot de Nantes Demi, aux producteurs d'A bout de Souffle, dans une lignée de films à petits budgets qui gagnent gros. Véritablement, nous sommes bercés, pris, scotchés par un récit posé, malin, construit et déconstruit tout à la fois, tout en humour et émotion. Une tendance à l'auto-mise en scène, qu'elle n'a jamais désavouée, et qu'elle nous explique encore dans la lecture de certains détails de ses films.

Ce film documentaire nous fascine comme rarement; Hugo disait "Quand je vous parle de moi je vous parle de vous", et nous ne pouvons que le constater ici. Agnès nous parle d'elle, mais cela nous parle; si l'on a vu ses films on s'en félicite, si l'on s'attache aux gens, si l'on met en avant l'amitié on se retrouve dans les amitiés d'Agnès, si l'on aime son quartier ses Daguerrotypes nous touchent, si l'on vient de perdre un proche, nous nous associons aux pertes des siens.

Exercice sur la mémoire, hymne à la conservation, hymne à la culture d'un univers personnel, éveil à l'art, invitation à forger son propre destin.

Varda est une mamie qui semble roublarde, vivante, son visage est resté intact, son corps s'est arrondi, le centre de gravité s'est abaissé; son esprit reste inventif et vif, emprunt de son humour tout personnel et souriant à la vie. Ses amis s'en félicitent et lui offrent la plus belle collection qui soit de balais, pour sa double quadragénie. Optimisme général ?

Pas nécessairement, et cela est sans doute le bémol à cette très belle oeuvre, sans en être véritablement un, Agnès nous donne l'impression d'être rescapée, mais aussi à l'heure du bilan.

Ce résumé sonne parfois testament, et Agnès de conclure:

"Je me souviens tant que je suis vivante.".

Conjurons avec elle et admirons ce très bon opus.


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